« Passe derrière moi, Satan ! » répond Jésus en entendant dans la bouche de son apôtre les mêmes paroles que celles du tentateur au désert, qui voulait l’entraîner vers une réussite humaine. Pierre ne conçoit le Messie que comme le grand gagnant. Il s’oppose ainsi à la prédiction de la passion, à cet échec au plan humain.
« Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive ». Renier ce qui, en moi, tend vers la gloire humaine.
Armand avait fait une brillante carrière. Tout s’écroula brusquement au plan financier. Divorce, chômage. Un psychologue l’aida à revoir sa vie. Il comprit qu’il avait voulu se venger d’une enfance pauvre et avait tout misé sur la réussite. Prendre sa croix, c’était tout simplement dire oui à sa vie, à son enfance, à ce père alcoolique, à cette mère trop résignée. Oui à tout pour en faire, avec le Christ, un bien plus grand. Suivre le Christ, c’était repartir de son histoire et entendre ce que l’Esprit lui suggérait. Sa croix, c’était sa honte d’enfant. Une prière monta spontanément de son cœur : « Seigneur, tu as porté ma honte, je veux maintenant vivre la honte de mon échec avec toi ». Il retrouva la force de chercher un travail plus modeste, de prendre humblement sa vie, sa croix en main.
Odile van Deth